Échiquier Nancéien
Interviews
Stéphane TRASSAERT

Stéphane TRASSAERT



[blockbreak]


(avril 2009)

Stéphane Trassaert est le plus fort joueur du club
(Elo 2172 au 1er avril 2009), et capitaine de l’Equipe I qui a évolué en N4 au cours de cette saison 2008/09.


DR :  Bonjour Stéphane. En guise d’introduction, peux-tu brièvement te présenter ?

ST :   Je suis né à Lille en 1972. Je suis marié et père de 3 jolies filles âgées de 2 à 8 ans. J’ai fait toutes mes études à Lille, jusqu’au doctorat en Electronique. Je suis actuellement Ingénieur à RTE, une filiale d'EDF, qui gère le réseau de haute tension. De par mon métier, je mute régulièrement, d'où mon arrivée en Lorraine il y a 1 an et demi.

DR :  Je crois savoir que tu es tombé dans la marmite des échecs quand tu étais petit. Peux-tu nous en dire plus ?

ST :   Effectivement, mon père m'a appris à jouer vers 6 ans. Puis, j'ai été inscrit dans un club de jeunes vers 7 ans. Je n'ai plus arrêté depuis ! La méthode apprise dans ce club était davantage qu'une méthode classique d'apprentissage. Elle permettait de comprendre les ouvertures sans les apprendre par coeur. Et cela m'a aidé aussi dans la vie scolaire et professionnelle.

DR :  Tu as apparemment vite atteint un bon niveau, puisque tu as fait la couverture d'Europe Echecs, ...  tu avais quel âge au juste ? 

ST :   En effet, j'ai gagné rapidement les championnats du Nord jeunes dans chaque catégorie d'âge, de pupille jusqu'à cadet. De mémoire, j'ai dû être 2000 vers 17 ans. La photo de la couverture d'Europe-Echecs de mai 1988 a été faite dans le cadre des «Grands Prix» qui permettaient de qualifier 2 jeunes de chaque ligue pour le championnat de France jeunes. Ce Grand Prix de la Ligue du Nord-Pas-de-Calais avait eu lieu à Capelle-la-Grande, en même temps que l'open de février, et rassemblait les cadets et juniors en toutes rondes. J'était cadet 1er âge (15 ans) et j'ai tout de même gagné le Grand Prix avec 5,5/7 en battant notamment les 2 juniors favoris.

                            

Stéphane est facilement reconnaissable au centre de la photo, en T-Shirt rouge

DR :  Peux-tu me citer tous les clubs successifs par lesquels tu es passé ? Lequel ou lesquels t'ont plus particulièrement marqué ?

ST :   Cela ne va pas être dur car j'ai une fidélité à toute épreuve ! J'ai commencé au Stratège Club de Lille jusqu'au jour où il y a eu une scission amiable dans le club pour créer le club de Roubaix Metropole Chess tourné vers la compétition de haut niveau. Je devais avoir 22 ans. Nous avons été jusqu'à la nationale 1 et avions par exemple Jean-Marc Degraeve dans l'équipe. Mais le club a dû fermer la porte pour des raisons financières (pas de soutien de la mairie de Roubaix). Je suis alors retourné dans mon club originel qui avait changé de nom : Lille Metropole Chess (avez-vous vu l'analogie avec Roubaix!). Ensuite, j'ai été embauché par EDF en 1999 en région parisienne et j'ai donc adhéré au club du Chesnay-le Roi Soleil qui était en nationale 1. Puis après ma mutation dans le Nord en 2002, je suis retourné au LMC et enfin, ma mutation en Lorraine a entraîné mon adhésion à l'Echiquier Nancéien !

DR :  Tu as fait de la compétition très tôt. Tu as donc probablement côtoyé ou affronté des joueurs, pas ou peu connus à l'époque, qui se sont faits depuis un nom dans le landerneau des échecs ?

ST :   J'ai côtoyé Jean-Marc Degraeve (GMI -2553) qui a 1 an de plus que moi. Il est chti comme moi ! Je me souviens d'une partie où j'avais une pièce de plus contre lui. J'ai quand même fini par perdre ! Aujourd'hui, je n'aurais plus aucune chance contre lui.

DR :  J'imagine que, à l'instar de nombreux joueurs, ta façon de travailler les échecs a évolué avec l'irruption de l'informatique dans le monde des 64 cases. Comment te prépares-tu pour les compétitions ? 

ST :  Je regarde les parties des adversaires pour voir leur façon de jouer, pas seulement pour les ouvertures.  Je regarde ainsi s'ils aiment les finales, les parties tendues ou plutôt calmes. Cela peut me permettre dès fois de choisir telle variante dans la partie qui serait un point faible pour lui.

DR :  Il y a actuellement aux échecs une tendance à réduire des cadences. Quel est ton avis sur la question ?

ST :   Je trouve que l'ajout d'un incrément (merci Fischer) a été un progrès considérable pour éviter les zeitnots qui étaient fréquents et injustes parfois. Quant à la réduction du temps alloué, je trouve cela dommage. Je suis assez puriste et j'aime rechercher la vérité d'une position. Il faut du temps pour cela. Et avec mes capacités intellectuelles qui se réduisent avec l'âge, il faut un peu plus de temps de réflexion !

DR :  C'est le moment de te poser la question rituelle, car tu fais partie d'une génération qui a encore beaucoup travaillé avec les livres : quel est celui qui t'a le plus marqué, si toutefois il y en a un ?

ST :   S'il y en avait 1, ce serait «Mon Système» de Nimzovitch. En plus divertissant, il y a «Des Echecs à l’infini» de Karpov.

DR :  Et le dernier livre que tu as lu ?

ST :   Je n'en ai pas lu depuis longtemps. Je lis dorénavant Europe-Echecs tous les mois. Et de temps en temps «Test your chess IQ, Grand Master Challenge» de Livshitz, pour faire des exercices de tactique (le cerveau est un muscle qu’il faut exercer régulièrement !) 

DR :  As-tu un modèle parmi les joueurs actuels ou ceux du passé, dont le jeu t'inspire plus particulièrement ?

ST :   Je n'ai pas trop été inspiré dans le jeu par les plus forts car les variantes sont en général trop pointues. Cependant, j'ai bien aimé Kasparov tant par son jeu agressif que par la peur qu'il mettait sur les visages de ses adversaires. Et bien entendu, Fischer dans le même registre.

DR :  Comment définirais-tu ton propre style de jeu ? Quels te paraissent en être les points forts et les points faibles ?

ST :   Au début, j'aimais bien les parties romantiques dans ma jeunesse, avec plein de tactique. J’ai même joué régulièrement le Gambit du Roi. Dorénavant, j'aime bien construire la partie avec un petit avantage à améliorer petit à petit. Mon point fort, ce sont les finales. Mon faible serait d'être trop matérialiste : j'ai du mal à me séparer d'un pion contre de l’initiative !

DR :  Tu nous fais bénéficier de ton expérience lors des cours (soit dit au passage très appréciés) que tu donnes régulièrement au club. Maintenant que tu connais bien nos joueurs, leurs forces et leurs faiblesses, sur quoi te semble-t-il important de mettre l'accent dans ces cours ?

 ST :   Merci du compliment pour les cours. Les joueurs n'ont pas encore tous le même niveau donc c'est difficile de répondre. Je pense qu'il faudrait qu'ils travaillent chez eux le cours qu'ils ont vu (je n'en vois pas beaucoup qui prennent des notes d'ailleurs !). Pour les plus faibles, il faut travailler la
tactique et les ouvertures pour avoir une position acceptable à l'arrivée au
milieu de jeu. Pour les plus forts, il faudrait peut-être travailler des ouvertures particulières, mais je ne suis pas capable moi-même de donner ces cours-là. Et surtout les finales qui ne semblent pas être leur tasse de thé ! Mais elles sont tellement importantes car elles permettent de concrétiser les avantages acquis en cours de partie (ou résorber les faiblesses !).

DR :  Tu as coaché cette année l'équipe de N4, qui monte en N3. Coaching gagnant donc. Comment vois-tu la saison 2009/2010 à venir ?

ST :   Pour le coaching, j'y suis pour un petit peu peut-être, mais c'est surtout l'équipe entière qu'il faut féliciter. Ils ont su répondre présents et sont restés assidus toute l'année. Claire a par exemple accepté de ne pas jouer les matchs importants pour laisser sa place à Primoz. Chacun a apporté sa pierre à la montée. Pour l'avenir de la N3, il faut vraiment se poser la question car je ne vois pas l'intérêt de se faire massacrer en N3 en faisant de plus grands déplacements, surtout en comptant les départs de Vivien et de Primoz. Et d'autant plus que l'on n'est pas sûr que notre féminine attitrée soit présente, en fonction de l'évolution de sa vie professionnelle.

DR :  Et plus généralement pour le club dans son ensemble, maintenant que nous avons surmonté les problèmes financiers ?

ST :   Nous les avons surmontés surtout grâce à un mécène qu'il ne faut pas oublier de remercier. [DR : il s’agit de Robert Moutaux] Le club remonte la pente. Je n'ai pas connu le bas-fond, mais actuellement, il règne une bonne ambiance et c'est ce que j'apprécie. Je ne regrette pas d'avoir choisi ce club, malgré les appels du pied de Stanislas (Claude Adrian) en début de cette saison pour jouer en N3. Quant aux cours, je veux bien continuer l'année prochaine, mais il faudrait que l'on se répartisse davantage avec Daniel et Denis. Je commence à ne plus avoir de matière (je me basais sur des cours par correspondance que je faisais avec un maître FIDE). Sinon cela me demanderait davantage de travail de préparation.

DR J'imagine que les échecs occupent une bonne part de ton temps libre. Mais tu as probablement d'autres hobbies ? 

ST :  Je joue au tennis et en ce moment, je réalise une maquette en bois qui est la reproduction au 1/110e du navire «Le HMS Bounty». 

DR :  J'ai pu constater à plusieurs reprises que les déplacements pour les interclubs étaient l'occasion de discussions musicales passionnées dans la voiture, avec fond sonore adapté. Quels sont tes goûts en la matière ?

ST :  Plutôt Rock, Hard-Rock même! Mes groupes préférés sont Metallica et AC/DC. J'ai des goûts assez éclectiques en fait. Car j'aime aussi écouter du classique ou de la variété.

DR :  Tu participes à la tenue du site web depuis cette année, en tenant la rubrique "Positions et combinaisons". Corvée, plaisir, ou un peu les 2 ?

ST :   Je ne dirai pas une corvée. Cela prend du temps de saisir les parties et de sélectionner un diagramme. J'essaie de trouver des positions pédagogiques et c'est ce qui me fait plaisir. Ce qui est un peu embêtant, c'est que je ne sais pas si cela plait. Il n'y a pas beaucoup de retour des membres du club : est-ce trop facile, trop dur ? Faut-il plus de finales ou de milieux de jeu ? Pour le moment, j'axe les choix sur les combinaisons. 

DR :  A propos du site de l'Echiquier Nanceien : Tham l'a construit pour être un véritable lien entre les joueurs du club. Qu'en penses-tu, comparé à ce que tu as pu voir ailleurs ?

 ST :  Je pense qu'il est bien fait. Le fait de pouvoir faire des parties en différé est appréciable. Et il est suffisamment alimenté pour avoir des nouveautés régulièrement.

 DR :  La saison échiquéenne 2008/09 va bientôt se terminer. T'es-tu fixé des objectifs pour la saison prochaine ?

 ST Objectif personnel non. Je ne compte pas vraiment progresser. Je n'en ai plus l'envie, donc je ne me prends plus le temps nécessaire. Et une famille nombreuse prend beaucoup de temps aussi !

 DR :  Tu as sûrement dans tes archives une partie dont tu es plus particulièrement content, et qui pourrait constituer le mot de la fin de cette interview ?

 ST :  Je vous livre la partie qui constitue mon meilleur exploit à l’heure actuelle : avoir battu un GMI en tournoi semi-rapide. Les commentaires sont de Yves Lamorelle (maître FIDE et mon ancien prof d’échecs), et avaient paru dans le journal "La Voix du Nord", le journal local, équivalent nordiste de l’Est Républicain ici. En partie longue, mon meilleur résultat est une nulle contre un GMI (Legky).

 

TRASSAERT Stéphane (2160) – GUREVITCH Dimitri (2550)

Roubaix, 1995

Défense sicilienne

1.e4 c5  2.Cf3 d6  3.d4 cxd4  4.Cxd4 Cf6  5.Cc3 Cc6  6.Fg5 e6  7.Dd2 Fe7  8.0-0-0 0-0  9.f4  Stéphane joue la variante la plus aggressive. Celle qui correspond le mieux à son style mais aussi celle qui est la plus recommandable contre un joueur beaucoup mieux classé que soi  9. … h6  10.Fxf6?!  une idée naïve… qui va s’avérer gagnante. Les Blancs envisagent de prendre d6. Mais pour cela ils doivent concéder de gros avantages aux Noirs : paire de Fous, domination de la grande diagonale, attaque sur leur propre roque, qui rendent particulièrement douteux cet échange. Meilleur était 10.Fh4  10. … Fxf6  11.Cb3  Et non 11.Cxc6? bxc6  12.Dxd6 Da5! et l’attaque noire est dévastatrice  11. … Db6?!  Malgré l’aspect thématique de ce sacrifice de pion, il est peut-être ici inutile et douteux. Les Noirs devraient se contenter de 11. … Fe7 suivi d’un assaut de pions à l’aile Dame  12.Ca4! et non Dxd6? Fxc3  13.bxc3 De3+  regagne le pion avec avantage  12. … Db4  forcé, pour ne pas perdre d6 sans compensation  13.Dxb4 Cxb4  14.a3  simplement. Maintenant sur un simple retrait du Cb4, les Blancs parviennent à leur fin : d6 saute  14. ... Fd7  15.Cc3 Cc6  16.Txd6 la position blanche est sans doute gagnante  16. … Tad8  17.e5 Fe7  18.Td2 Fc8  19.Fd3 b6  20.Thd1 Fb7  21.Fe4 Txd2  22.Txd2 Td8  23.Txd8 Fxd8  après ces échanges massifs inévitables sur la seule colonne ouverte, la tâche des Blancs paraît simplifiée  24.Cb5  24.Cd4 était à envisager  24. … a6  25.Cd6 Fa8  26.Cd2 f6  27.Cc4?  27.Cf3 était meilleur. Mais 27.exf6 devait être aussi envisagé. Par exemple : 27. … Fxf6  28.C2c4! b5??  29.Cb6  gagnait  27. … b5!  28.Ce3 fxe5  tout est à refaire, car ce pion tombe à présent  29.fxe5 Fb6!  Bien sûr e5 est tabou pour l’instant à cause du clouage sur le Fa8  30.Rd2 Fd4!  Maintenant les Noirs regagnent le pion avec égalité  31.c3 Fxe5  32.Cc8!? Rf8??  L’ultime erreur qui perd sur le champ la partie. Il fallait choisir la case f7 pour le Roi  33.Cb6  décisif. Les deux Fous sont en prise! Si 33. … Fb7  34.Cd7+ (où l’on voit que la case f8 est fatale au Roi) et 38.Cxe5  33. ... Fxh2  34.Cxa8  1-0

Les commentaires appartiennent à leurs auteurs. Nous ne sommes pas responsables de leur contenu.
Connexion
Pseudo : 

Mot de passe : 


Perdu le mot de passe ?

Mini calendrier
Mars 2024
Add event Proposer
L M M J V S D
        1 2 3
4 5 6 7 8 9 10
11 12 13 14 15 16 17
18 19 20 21 22 23 24
25 26 27 28 29 30 31

Mairie de Nancy


Radio Fajet

Contre la discrimination

Échiquier Nanceien : 8 rue Jeannot 54000 Nancy