Robert MOUTAUX

DR : M. Moutaux, pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?

RM : J’ai actuellement 74 ans. Je suis en retraite depuis 1993, après une vie professionnelle passée dans l’industrie. J’ai passé ma jeunesse en région parisienne. Ma vie professionnelle m’a ensuite amenée à Belfort, puis à Nancy. Plus tard, je suis retourné en région parisienne pour fonder une société industrielle. Et pour ma retraite, je suis revenu m’installer à Nancy.

DR : Vous souvenez-vous de vos premiers pas aux échecs ?

RM : Oui, j’en ai un souvenir très précis. J’ai croisé les échecs à la fin de l’année 1943. Moi et mon père avions tous deux attrappé les oreillons, juste avant les fêtes de fin d’année. Pour Noël, ma mère avait offert à mon père un échiquier. C’est lui qui m’a appris à jouer à ce jeu pendant les quelques semaines de notre maladie commune.

DR : Et depuis lors, c.à.d. depuis près de 65 ans, vous pratiquez les échecs régulièrement ?

RM : Non, en fait j’ai passé une partie de ma vie à ne pas jouer aux échecs. Ma vie professionnelle ne m’en laissait pas le temps. Je n’ai vraiment repris les échecs qu’en 1978, à Nancy, après que ma situation professionnelle se soit stabilisée. J’ai à nouveau connu une interruption en 1982, après mon départ pour Belfort. Je me suis inscrit à l’Échiquier Nancéien en 1993, au moment où je suis revenu m’installer à Nancy pour ma retraite.

DR : Je sais que vous avez occupé des postes de responsabilité au club. Pouvez-vous en dire plus ?

RM : Bien sûr. En 1994, le président de l’Echiquier Nancéien était Gérard Perrot. C’est un homme que j’appréciais, et je crois que c’était réciproque. Il m’avait demandé d’être trésorier du club. J’avais accepté, et j’ai assumé cette charge jusqu’en 2000, année ou j’ai succédé à Claude Adrian comme Président du club. J’avais accepté cette nouvelle fonction, moins par vocation que pour rendre service au club.

J’ai quitté la présidence en 2002, pour 2 raisons : d’une part j’avais des problèmes de santé, et d’autre part, suite à l’inondation de l’ancien local du club, le déménagement au club St Nicolas avait été décidé sans même que je sois consulté, une façon de faire que j’avais trouvée inacceptable.

DR : Avez-vous des souvenirs échiquéens qui vous ont particulièrement marqué ?

RM : A bien y réfléchir, j’en citerais 2 : le plus récent est mon gain dans l’Open A de Cannes en 1999. Mon elo à l’époque avoisinait 2100, et il est vrai que c’était une année un peu spéciale pour cet Open : il ne s’était pas déroulé dans les conditions habituelles, le palais des congrès n’étant pas disponible. Nous avions joué sous des tentes, ce qui avait probablement dissuadé quelques forts joueurs…

DR : …Ce qui n’enlève rien à votre mérite. Et votre deuxième souvenir … ?

RM : C’était en 1983, au championnat de France à Belfort. J’avais fini vers la 10e place de l’Open, et était sacré 1er joueur de Franche-Comté. Vu la force des adversaires, cette 10e place valait largement au niveau de la performance ma 1ère place à Cannes.

DR : Et dans la catégorie des mauvais souvenirs
?

RM : … Hmmm …?… Non, je ne vois pas. Les échecs sont pour moi une discipline sportive. Perdre ne me pose aucun problème. Par conséquent, je ne peux pas vraiment associer de mauvais souvenir à ce jeu que je pratique avec passion.

DR : Avez-vous des modèles, et si oui, quels sont-ils ?

RM : Mes références sont des joueurs comme Tal, Lasker, ou Kasparov. Ils ont un jeu très combinatoire. J’admire aussi beaucoup d’autres grands joueurs, comme Capablanca, Botvinnik ou encore Petrossian, mais je ne les comprends pas bien. Le jeu positionnel m’échappe un peu, je dois dire.

DR : Vous avez 70 ans passés, et vous venez encore de gagner des points Elo au dernier classement, pour monter à 1970 Elo. Quel est votre secret de longévité ?

RM : J’ai le souci permanent de rester intellectuellement actif. Ainsi par exemple, j’ai appris la physique quantique alors que j’étais déjà en retraite. Suite à mes problèmes de santé en 2000/2002, je pratique aussi maintenant plus d’activité physique depuis 5 ans. Cela me permet de garder la forme.

Mais je suis aussi tout simplement un passionné de ce jeu. Je le pratique très régulièrement, au moins une fois par semaine. Je m’entraîne essentiellement avec des livres, ceux de Botvinnik par exemple.

DR : Un mot sur le nouveau champion du monde récemment sacré à Mexico, Viswanathan Anand ?

RM : J’attendais depuis longtemps qu’il devienne champion du monde. C’est un très grand joueur, qui possède toutes les qualités, à la fois tactiques et stratégiques.

Et je suis content aussi que ce premier titre réunifié aille dans le pays qui a inventé le jeu.

DR : Et pour finir, comment voyez-vous l’avenir du club, et notamment la saison à venir ?

RM : En rose!

Je crois qu’on peut dire maintenant que les gros problèmes sont derrière nous. Nous sommes revenus à l’équilibre financier. L’effectif lui aussi s’est maintenu cet automne, preuve que les joueurs se sentent bien au club. Autant la saison dernière a été difficile, autant celle-ci s‘annonce donc plutôt bien.

Par ailleurs, j’apprécie l’esprit actuel du club : il n’y a pas de tension, et l’ambiance est sympathique, comme cela doit être dans un vrai club.

Enfin, je souhaite que le club soit dirigé par une petite équipe bien soudée et entreprenante en phase avec un président dynamique.

DR : Merci Mr Moutaux d’avoir bien voulu inaugurer cette nouvelle rubrique du site.